Ainsi que mes récits en témoignent sur mes blogs pros et personnels, depuis quelques mois je m’absente régulièrement du cabinet d’expertise-comptable que je gère depuis dix ans. Afin qu’il puisse continuer de prospérer, j’essaie d’autonomiser progressivement mon équipe. J’étais exactement dans cette démarche en tentant une expérience inédite cette année : faire de la carte de vœux 2018 du cabinet un choix collectif des salariés et non pas une décision unilatérale.
Qu’il s’agisse d’embauche ou d’un changement d’organisation au sein du cabinet, à chaque fois que j’ai eu une décision importante à prendre, j’ai toujours consulté mon équipe. Au début, j’étais plutôt en mode : « je vous propose cela qu’en pensez-vous ? » Mais dans les faits, il n’y avait pas de vrai débat. Mes salariés n’étaient pas prêts. Ils trouvaient cela bizarre et n’osaient pas parler devant les autres de peur d’être jugés. Il y a trois ans, j’avais tenté une autre méthode en effectuant un sondage anonyme concernant le processus d’augmentation. J’ai appliqué ensuite ce que la consultation avait fait ressortir. Mais cette fois, j’avais envie d’aller plus loin.
J’ai choisi délibérément un projet qui ne constituait pas un enjeu important : la carte de vœux du cabinet. Les années précédentes, soit je la sélectionnais moi-même, soit j’en prenais quelques-unes avant de leur demander leur avis. Là, j’ai fait circuler dans le cabinet un catalogue contenant une centaine d’options de cartes : chaque salarié devait en choisir une, mettre le numéro correspondant sur un petit bulletin et déposer celui-ci anonymement dans une « urne » disposée à cet effet.
Neuf cartes ont reçu des suffrages de la part des treize votants. Pour trancher entre les neuf options, nous avons eu recours au processus du jugement majoritaire. Je voulais le tester dans mon cabinet après l’avoir expérimenté pour la primaire des présidentielles et aussi parce que je suis en train de lire Reinventing Organizations : Vers des communautés de travail inspirées, le livre de Frédéric Laloux qui parle notamment des différentes méthodes de gouvernance. Le jugement majoritaire fonctionne par appréciation et non par vote nominatif et était supposé dégager la carte médiane, qui convenait au plus grand nombre.
Ces expériences ont permis aux mentalités de mes salariés d’évoluer en douceur. Même si c’était complexe, que nous nous sommes bien pris la tête, le résultat est satisfaisant pour tout le monde. Et le processus s’est avéré plus fluide lorsque nous avons eu de nouveau recours au procédé pour déterminer le texte de la carte, ainsi que le format de la fête de fin d’année. Les salariés de Cecoval ont validé les résultats, même s’ils jugent cette méthode trop complexe et chronophage pour des décisions importantes. Mais je n’ai pas l’intention d’en rester là. Un jour ou l’autre, un choix majeur sera fait collectivement. Et si le jugement majoritaire ne convient pas, je trouverai un autre moyen.